
le cinéma de françois
Cette critique va vous plonger, cher lecteur, dans un monde fait de décadence, de trahison, de valeurs peu avouables et de manipulations. Bienvenue dans le monde gris et étouffant de « Foxcatcher ».
Histoire :
1987. Mark Shultz est un lutteur professionnel qui a obtenu la médaille d'or aux derniers jeux olympiques. Il s’entraîne pour les championnats du monde en compagnie de son frère aîné Dave, qui est également lutteur et son mentor. Un jour, Mark est convoqué par le très riche John du Pont, grand amateur de lutte, qui veut le prendre sous son aile et l'entraîner en vue des prochains mondiaux et jeux olympiques. Mark, charmé par le pouvoir, la richesse et la vision du monde de du Pont, accepte et rejoint Foxcatcher, la demeure privée de la famille du Pont. Mais le choix de Mark va avoir des conséquences dramatiques pour lui et ses proches.
Mon avis :
Quel choc. « Foxcatcher » est un film incroyablement prenant, passionnant et extrêmement riche en allusions psychologiques. Le film est extrêmement noir, déstabilisant mais ne semble jamais trop long ou ennuyant grâce à une finesse à tous les niveaux : de l'interprétation des acteurs au images en passant par les thématiques, le réalisateur Bennett Miller a tout misé sur la sobriété et offre une parabole sur le déclin de l’Amérique des puissants car le sujet de départ (qui est tiré d'une histoire vraie) dérive très vite vers une vraie fable sur le pouvoir de l'argent, l'isolement des nantis et la fascination de la société américaine pour les valeurs (qu'elle considère comme absolue) et la réussite. Le personnage de du Pont, absolument terrifiant par son isolement, son absence totale d'empathie et son ambition dévorante, va d'ailleurs provoquer la chute de toutes les valeurs qu'il prétend brandir au nom de sa famille et de son pays dans un développement psychologique très bien développé au cours du film et jamais surligné ou exagéré : le spectateur doit lire entre les lignes et les ellipses pour saisir toute la richesse du long métrage et sa substantielle moelle : le scénario est simple et ne s'appuie pas sur les rebondissements mais est riche en allusions et en symboles ce qui peut être un peu déroutant au tout début du film mais se justifie dans son développement. Voilà ce que je peux dire sur les thèmes et sur la façon dont le scénario est traité. Je ne vais pas en dévoiler plus car tout le sel du film vient de la découverte : il est nécessaire de ne pas trop se renseigner sur l'histoire vraie avant d'avoir vu le film sous peine de perdre tout le sel de la découverte de cet univers glacé.
La réalisation de Bennett Miller est froide, ce qui sert bien le propos, et parsemée de plans de toute beauté : la photo du film est au top ! Comme dans tout le reste du film le réalisateur joue la carte de la sobriété et de la pudeur, évitant les plans flash ou le montage épileptique. Cette réalisation classique et classieuse est de toute beauté ! La musique est très bonne bien que très peu présente mais illustre les scènes ou elle est nécessaire comme il le faut. Au niveau des acteurs c'est du très bon : le trio principal est époustouflant : Channing Tatum est parfait en lutteur mutique et un peu bas du front, Mark Ruffalo grandiose en grand frère aimable et protecteur et Steve Carrel incroyable dans le rôle du richissime du Pont, homme frustré et ambigü : l'acteur s'éloigne ici de ses rôles comiques et offre une performance dramatique de haut vol faisant ressortir tout le côté malsain et terrifiant, voire aussi pathétique de son personnage.
En conclusion, « Foxcatcher » est pour moi un des meilleurs films que j'ai vu cette année : très riche et offrant une parabole particulièrement cinglante de l'effondrement de notre monde, il bénéficie également de performances d'acteurs en état de grâce et d'une profonde réflexion sur le pouvoir. La noirceur du film peut désarçonner mais il ne fait aucun doute que « Foxcatcher » vous remuera de l'intérieur si vous êtres prêt à vous laisser envahir par son hypnotique noirceur.
Les plus :
- La richesse des thématiques
- La profondeur psychologique des personnages
- Le scénario, tout en finesse, ellipses et allusions
- La photographie de toute beauté
- Les incroyables performances d'acteurs
- Passionnant de bout en bout
Les moins :
- Très noir et désespéré, pas l'idéal quand on a pas le moral soyez prévenus !
Ma note:
4/4
